L’école m’a sauvée : paroles de femmes publiées par le magazine Marie Claire

À l’occasion du lancement de la Flamme Marie Claire l’année dernière, Rebecca Fitoussi avait confié au magazine « Moi, l’école m’a sauvée » au regard de son chemin parcouru depuis sa cité HLM de Colombes jusqu’au JT de LCI.  Ainsi ces mots ont touchés Marie Claire et sa rédaction a donné envie de faire témoigner d’autres femmes : enseignante, photoreporter, chef d’entreprise qui disent devoir leur réussite à l’école de la République. Séverine Desbouys faisant partie des femmes interviewées.

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Crédit photo : Alex Cretey

Je suis originaire de Lapalisse, près de Vichy, dans l’Allier. Mon père était contremaître, et ma mère, serveuse dans un restaurant, avec un statut de maître d’hôtel. De la maternelle à la terminale, des enseignants, surtout en maths et en sport, ont su détecter mon potentiel, révéler mes qualités stratégiques, développer mon esprit d’équipe et m’amener là où je suis aujourd’hui : à la tête d’un cabinet international de conseil. Parmi mes clients de renom, Netflix et la géant chinois de la vente en ligne Alibaba. Auparavant, grâce au sport scolaire, j’ai participé à neuf tours de France (et emporté trois victoires d’étapes), dix championnats du monde, et j’ai été sacrée meilleure grimpeuse.

Je rends donc hommage à mon instituteur de CE1 qui, pour me mettre en avant, m’avait confiée les animaux de la classe, en tandem avec Catherine, une mauvaise élève. Ensemble, nous nous occupions des lapins, oiseaux, cochons d’Inde, et rendions des comptes au tableau : naissances, maladie, alimentation. Cela m’a appris à prendre soin d’autrui et à m’exprimer en public. Il a aussi été le premier à remarquer mes capacités sportives : lors de nos petites compétitions, je mettais la raclée aux garçons. « Au collège, d’autres “bonnes fées” se sont penchées sur moi : le professeur de maths m’avait demandé ce que je voulais faire plus tard : “Prof de sport.” Il m’a répondu : “Non, non, tu seras sans doute chef d’entreprise ou dans des postes à responsabilités.” J’en doutais. Mes parents me disaient : “Tu sais, déjà, si tu dépasses Vichy… au mieux tu seras peut-être caissière à Cora, et ce sera déjà très bien.

J’ai quitté un lycée classique pour intégrer le Creps (sport études) à Saint-Amand-Montrond, dans le Cher, où j’étais la seule fille au milieu de quinze garçons. Quand, en fin de première, j’ai fait une grave chute, les professeurs se sont mobilisés pour m’aider à rattraper mon retard, le soir, me transmettre les cours. Merci au sport scolaire, qui m’a aussi permis de voyager, alors qu’avec mes parents on n’allait même pas à Clermont-Ferrand, à 90 km de Vichy. « Aujourd’hui j’habite dans les beaux quartiers, à Neuilly, et j’aime taquiner mon père en lui disant : “Tu vois, tu avais dit que je ne dépasserais jamais le Cora de Vichy, et aujourd’hui j’ai fait plusieurs fois le tour du monde, grâce au sport et à mes compétences.” C’est pourquoi je suis devenue ambassadrice du sport scolaire, pour montrer que le sport à l’école publique est primordial pour se construire.

 Propos receuilli par Corine Goldberger publié par Marie Claire le 11 septembre 2017